Mettre le Client au cœur de sa Stratégie de Valeur : un levier de croissance puissant mais exigeant…

27 mai 2015 - Auteur : Natacha Leymarie

Face aux compétiteurs internationaux et aux prix bas pratiqués dans de nombreux secteurs par des compagnies issues de pays aux contraintes (économiques et sociales) très inférieures à celles des pays occidentaux et, spécifiquement, de la France, de nombreuses entreprises sont prises entre deux pistes :

  • Sortir par le bas avec une stratégie de volume (baisser les prix voire la qualité associée)
  • Sortir par le haut avec une stratégie de valeur (maintenir des prix élevés voire les augmenter, en justifiant cette tendance par une excellence de la Qualité de Service, c’est-à-dire des produits, des services et de la relation).

 

Cette seconde piste n’est pas un choix rare (en France, le Club Méditerranée est l’entreprise la plus emblématique dans ce virage à 180°) mais sa mise en œuvre est loin d’être facile

Non seulement parce que le niveau du prix ne suffit pas, à lui seul, à créer de la valeur en soi pour le client (même si l’on sait que, phénomène psychologique et sociologique bien connu, de nombreux clients sont sensibles aux prix élevés, la « taille » du prix les renvoyant à un marqueur de qualité et un levier dans une quête de reconnaissance sociale : c’est sur cette corde que de nombreuses marques jouent) mais, encore, parce que la notion de Qualité est fort complexe à définir, calibrer et maintenir.

En effet, d’une part, définir la qualité implique de travailler au moins sur trois réalités complémentaires en tenant compte des attentes des clients sur chacune d’elle :

  1. Les caractéristiques intrinsèques qui définissent le produit ou le service générique vendu (la description du produit ou service et la « promesse » faite au client)
  2. Les caractéristiques de la « réplique » du produit ou du service effectivement livré à chaque client (l’absence de « défaut », l’assurance qualité)
  3. La nature et le déroulement des interactions avec le client (la relation de service).

Mais ceci ne va pas toujours de soi :

  • Les « habitudes internes » sont parfois (trop souvent…) des freins : conduire une démarche « outside in » peut être vécu comme contre-nature par les équipes, particulièrement dans des entreprises qui se sont bâties sur une culture centrée produit plus que service
  • Et la volatilité des attentes du Client n’aide pas : non seulement parce que les attentes des clients sont multiples et parfois contradictoires mais, surtout, parce qu’elles sont souvent inconstantes (les attentes « immédiates de l’ici et maintenant » n’étant pas forcément celles de demain marquées par les megatrends qui traversent nos sociétés) :

D’autre part, calibrer la qualité voulue suppose de faire des choix sur les types ou segments de clients à cibler.

Or choisir, c’est renoncer et c’est aussi s’engager… Ce qui n’est pas toujours facile pour une entreprise, la peur de se tromper étant toujours plus forte dans un monde où, la montée de l’individuation aidant, les clients cibles sont de moins en moins réductibles à un petit nombre de catégories.

Enfin, maintenir la qualité implique de faire preuve de constance dans ce qui est effectivement livré au Client, d’être en contrôle de toute la chaîne de création de valeur, y compris de ses maillons les plus « impalpables » (par exemple dans les interactions directes entre le client les représentants de la compagnie) et, aussi, de prévoir les leviers d’ajustement qui permettent aux équipiers en lien direct avec le client de palier en temps réel les impensés du processus, ce qui n’est pas « contrôlable », les imprévus.

C’est souvent sur ce dernier point (la qualité des interactions) qu’une compagnie joue son image de marque et sa capacité à fidéliser les clients qu’elle s’est efforcée d’attirer. Particulièrement dans le secteur des services, où la création de valeur se fait principalement dans les interactions avec le Client.

Or, c’est souvent là que le bât blesse…

L’expérience prouve que, si certains processus doivent être formalisés et « standardisés » pour assurer un niveau de service constant aux clients, la poursuite d’une stratégie de valeur (de différenciation par la qualité justifiant des prix qui ne sont pas à proprement parler low cost) rime de plus en plus avec « sur mesure », en contradiction avec toute velléité de standardisation totale.

Et, là, la condition clé pour réussir, c’est de pouvoir compter sur « l’orientation Client » des équipes (à tous les niveaux hiérarchiques !), c’est-à-dire sur leur capacité à travailler collectivement au service du Client, suivant un style et dans une direction qui sont voulus par la compagnie, choisis comme leviers de différenciation (toutes les entreprises centrées client n’ayant pas forcément la même conception du service à livrer au Client).

Ceci implique de développer une culture d’entreprise fortement centrée Client en définissant précisément ce que veut dire être « centré Client » et quelle posture est attendue des équipiers, afin que, quel que soit l’imprévu, la réponse faite aux clients soit en cohérence avec le Positionnement marché et l’approche Client que la compagnie a choisi de poursuivre.

 

Dans ces conditions, développer une stratégie de valeur en mettant le Client au centre de l’entreprise repose sur une démarche systémique, actionnant divers leviers :

  • Formuler, au plus haut niveau de l’entreprise, une Stratégie centrée Client
  • Décliner ce cap, d’une part, en formalisant des processus et Normes de Service permettant de baliser le parcours du client et, d’autre part, en créant des offres innovantes globales (liant produit, services et modes relationnels) fondées sur l’analyse des attentes des clients ciblés et des megatrends appelés à marquer l’évolution de nos sociétés (aujourd’hui et plus encore demain).
  • Et, last but not least, développer une Culture d’entreprise orientée Client à chaque strate de la compagnie

Ce type de démarche, qui trouve sa meilleure application dans des contextes de repositionnement stratégique d’une compagnie sur son marché ou de construction d’une firme intégrée à l’occasion d’une fusion-acquisition, suppose de doser savamment ambition et pragmatisme…

Article complémentaire à l’interview menée par Thibault Lieurade sur Xerfi Canal

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